Selon l'historien Bernard Lugan, la crise diplomatique franco-algérienne révèle les failles d'un régime artificiel

L'escalade des tensions entre la France et l'Algérie atteint un nouveau sommet, mettant en lumière les fragilités d'un État né de la colonisation française. Cette crise, déclenchée par la reconnaissance française de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en juillet 2024, révèle les paradoxes d'un régime en quête d'identité.

La réaction virulente d'Alger à cette décision diplomatique française s'est manifestée par des actions hostiles. Ces actions ont culminé avec l'arrestation de l'écrivain Boualem Sansal et le refus d'accueillir un influenceur expulsé de France. Le ministère algérien des Affaires étrangères a qualifié la position française de "campagne de désinformation menée par l'extrême droite revancharde".

Cette posture belliqueuse masque les contradictions fondamentales du régime algérien. L'Algérie moderne, créée en 1830, s'est construite sur des territoires historiquement marocains, notamment à l'ouest. Des archives attestent que des régions comme la Saoura, le Gourara et le Tidikelt appartenaient au royaume chérifien avant la colonisation française.

L'enjeu géopolitique crucial se cristallise autour de l'accès à l'Atlantique. L'Algérie, avec une façade méditerranéenne limitée, cherche un débouché océanique en soutenant l'idée d'un État sahraoui indépendant, qui servirait ses intérêts stratégiques face au Maroc.

Économiquement, la position algérienne apparaît fragile. Les échanges commerciaux avec la France ne représentent que 12 milliards d'euros sur un commerce extérieur français de 770 milliards. Les importations de gaz et de pétrole algériens, respectivement 8% et 9% de la consommation française, sont facilement remplaçables.

L'emprisonnement de Boualem Sansal illustre la nervosité du régime face à toute remise en question de ses fondements historiques. L'écrivain a touché au sujet sensible d'un État dont la légitimité reste fragile en évoquant la marocanité de l'ouest algérien.

Cette crise diplomatique révèle un régime prisonnier de ses contradictions, incapable de se projeter vers l'avenir sans ressasser les traumatismes du passé. Face à une France qui change d'attitude et une Union européenne critique, le régime algérien pourrait être contraint de revoir sa stratégie de confrontation permanente.